En cette rentrée 2024/25, à l’heure où les choix budgétaires de la Région pour 2025 se dessinent, et où l’aggravation de l’austérité semble être à l’ordre du jour du gouvernement Barnier, la question des emplois et donc des moyens affectés à la mise en œuvre des politiques régionales est au cœur de l’actualité sociale dans notre collectivité.
1 – Au siège, l’heure est au gel de postes : 41 en 2024, peu ou prou le même nombre en 2025 et encore en 2026…
Nous demandions depuis l’automne 2023, des informations claires sur la situation de l’emploi dans les services, en face de rumeurs persistantes sur le gel, voire la suppression de postes,… et voyant que de nombreux postes libérés n’étaient pas publiés.
La réponse a mis plus de 6 mois à arriver. Lors du Comité de dialogue social du 6 juin 2024, l’exécutif et le DGS ont présenté les orientations de la collectivité en la matière.
41 postes permanents dans les services sont « retirés du schéma des emplois » en 2024, s’y ajouteraient les mêmes volumes en 2025 et en 2026, soit environ 120 postes sur 3 ans (1,4% des effectifs chaque année).
Ces postes sont maintenus au tableau des effectifs, ils ne sont donc pas supprimés, mais ils resteraient « non pourvus » pour un temps indéterminé.
Les postes concernés ne sont pas dévoilés, mais ils sont répartis par pôle pour 2024 et ont été établis « au prorata du nombre d’emplois permanents par pôle (hors postes liés à la fonction d’autorité de gestion des fonds européens) » :
- 10 au pôle EC
- 8 au pôle DEE et au pôle Ressources
- 4 au pôle FE, au pôle Finances et au pôle TIMCV
- 1 au pôle DATAR, à la DG et à la Direction de la Communication.
Ces chiffres ont été aggravés en novembre 2024, Lire nos informations dans le compte-rendu du CST du 14/11, suite à la présentation du projet de budget 2025 de la Nation, qui prévoit de ponctionner les collectivités locales à hauteur de 5 milliards €. 150 postes seraient gelés sur la période 2025/27 (soit 5 % des emplois en 3 ans) en moyenne 50 par an.
Le premier argument évoqué par l’exécutif est financier. La masse salariale augmente chaque année, même à effectif constant, du fait des évolutions de carrière, des mesures prises par l’Etat en matière salariale et des transferts de compétences insuffisamment compensés. Or les recettes de la Région stagnent, alors que ses dépenses continuent de progresser. Il faut donc réduire les dépenses.
Le second argument est d’ordre technique. Il s’agirait de disposer en permanence d’un nombre plus élevé de postes vacants, qui pourraient être ouverts rapidement au recrutement pour faire face à des besoins nouveaux.
Notre analyse.
Pour les représentants de l’Exécutif. « On reste à un niveau doux de régulation » des emplois, qui « ne remet pas en cause les grands équilibres ». « Les conditions de travail ne doivent pas se dégrader ». « On dispose de marges au siège ». Il faut simplifier les procédures « mais c’est compliqué », peut être aussi réduire les niveaux de contrôle. On fera forcément moins, puisque les crédits d’intervention sont en diminution….
Cependant, c’est clairement un frein sur l’emploi. 1,4 % de gel/an (4,2 % sur 3 ans) c’est beaucoup et c’est surtout du jamais vu, dans une collectivité qui a connu une progression régulière de ses effectifs.
Si l’on prend la référence de 2023, où environ 300 mouvements sur les postes ont été constatés dans les services (60 % pour des départs et 40 % pour des mobilités internes), un poste devenu vacant sur 7 serait gelé chaque année. Cela ne peut que fragiliser les services.
Quant aux gains de temps opérationnels, liés à une meilleure organisation, à de la simplification, ils restent incertains.
Autre incertitude, le gel peut se transformer en suppressions nettes de poste à terme.
Et les Agences régionales ?
L’impact est aussi sensible sur les Agences régionales qui sont financées par la Région, dans le champ de l’économie, de la formation, du tourisme ou de la culture, et qui vont voir leur dotation réduite.
Des suppressions d’emploi sont déjà décidées à l’Agence culturelle « l’A », dont la suppression de l’antenne de Limoges de cette agence.
2 – Dans les 296 lycées et les 2 Creps de Nouvelle Aquitaine : On souffle le chaud et le froid avec des gains de postes dans certains lycées et des suppressions parfois très sévères dans d’autres.
Le processus enclenché en 2019 arrive à son terme. La quasi-totalité des lycées ont connu cette phase dite de « dialogue de dotation », conduite par la DRH.
Les dialogues de dotation ont pour objet d’analyser les besoins en postes dans les établissements selon des critères basés principalement sur le nombre de m2 à entretenir et sur le nombre de repas à servir. Lire les détails en ligne. Téléchargez en pièce jointe, le tableau synthétique des critères de dotation qui sont appliqués.
A l’époque, c’était lors d’un Comité technique tenu à Limoges le 17 octobre 2018, l’ensemble des représentant.es du personnel s’était prononcé contre ce barème.
A la FSU, nous revendiquions des critères harmonisés entre les 3 anciennes Régions, afin d’aboutir à une égalité de traitement entre les lycées, mais nous dénoncions une harmonisation qui ne se faisait pas par le haut et nous alertions sur les conséquences graves pour les lycées que le nouveau barème allait classer dans la catégorie des établissements excédentaires. Nous pointions particulièrement les lycées du Limousin, les fonctions de maintenance, de lingerie,… qui allaient subir de plein fouet des suppressions.
5 ans après, ce que nous craignions s’est hélas réalisé.
109 lycées (42 %) gagnent des postes et c’est évidemment une bonne chose, 63 lycées (25 %) ont une dotation constante, mais 86 lycées (soit un lycée sur 3) ont des pertes qui représentent 188 postes, soit plus de 2 postes perdus en moyenne sur les 86 lycées concernés.
Et ce malgré la mobilisation des agents qui ont fait grève et manifesté (à l’appel de l’intersyndicale) pour défendre les emplois dès 2019 puis en 2022 où nous avions obtenu une suspension des dialogues de dotation, et également en 2024
Si le volume total des emplois affectés aux lycées baisse peu (environ 30 postes en moins sur plus de 6 000 postes), la situation est très contrastée selon les territoires.
La situation la plus grave est en Limousin où 29 lycées sur 42 perdent des postes (75,5 postes au total). Certains établissements sont particulièrement touchés : le lycée JB Darnet à St Yrieix : – 7 postes, Renoir à Limoges : – 6, Pierre Bourdan à Guéret : – 5 postes, Cabanis à Brive : -5, Jamot/Jaurès à Aubusson : – 4 pour ne citer que les derniers dialogues conclus en 2024. Dans certains lycées, le taux de suppression est de près de 20 % des effectifs. Seuls 8 lycées gagnent des postes (+ 13,5 postes seulement), soit un solde négatif de 62 postes, ce qui représente une perte de 6 % des effectifs pour les lycées de l’ex-Limousin. C’est énorme !
Dans la plupart des lycées victimes de suppressions de postes, les effectifs d’élèves n’ont pas diminué, la charge de travail globale n’est donc pas réduite.
Dans l’académie de Poitiers, le solde négatif est de 21 postes, avec quelques pertes importantes comme au Lycée de la Venise verte à Niort (-7), à Cordouan à Royan (-5), suppressions actées dès 2020 et 2021, et plus récemment fin 2023, au lycée Jean Dautet à La Rochelle (-5).
Dans l’académie de Bordeaux, où le solde est positif avec + 50 postes, certains lycées ont connu toutefois des suppressions en nombre important comme St John Perse à Pau (-5), Gaston Crampe à Aire sur l’Adour (-3), Supervielle à Oloron Ste Marie (-3) et ce dès 2020.
Les conséquences risquent d’être très lourdes pour les lycées concernés par les diminutions de postes : plus de pénibilité et plus d’arrêts maladie, baisse du niveau de service rendu aux usagers.
Aujourd’hui déjà, dans un certain nombre de ces établissements frappés par les suppressions de postes, la plonge – fonction la plus pénible – est assurée essentiellement ou exclusivement par des contractuels, du fait des restrictions médicales que connaissent les agents titulaires. La liste des agents dont l’état de santé est dégradé et qui ne peuvent plus tenir leur poste va s’allonger. Ils se retrouveront dans les dispositifs dits « de repositionnement » et de « reclassement », dans l’attente d’un poste (le plus souvent d’accueil), sachant que le nombre de postes pouvant être proposé n’augmente pas.
On peut être inquiet aussi, pour le niveau de service rendu aux usagers, qui risque de s’affaisser.
Quelles perspectives aujourd’hui ?
La FSU a adressé en 2023 au Président de Région des propositions d’évolution du barème de dotation : pour une meilleure prise en compte des restrictions médicales, une amélioration de la dotation en lingerie, espaces verts, en encadrement intermédiaire,… et pour améliorer le remplacement des agents absents : contractuels et titulaires-remplaçants.
Nous avons renouvelé ces demandes au CST du 20 juin 2024, en y ajoutant l’urgence d’une réflexion sur la gestion des fins de carrière, la dernière réforme des retraites, en repoussant encore l’âge de départ, ayant renforcé cette problématique.
L’exécutif a rappelé au CST du 20/06/2024 son accord pour rediscuter de la prise en compte des restrictions médicales, et pour poursuivre le mouvement de créations de postes supplémentaires de titulaires-remplaçants dans les lycées.
Concernant, la gestion des fins de carrière, le questeur estime que les collectivités locales ne pourront y parvenir seules, sans l’intervention de l’Etat.
Télécharger : le tableau synthétique des critères de dotation.
Photo : Plonge Lycée Cabanis (Brive).